Un Atelier d'experts internationaux organisé au CSM dans le cadre de l’ICRI

Réduire les risques d'impact du changement climatique sur les récifs coralliens : quelles solutions ? Un atelier international a été organisé dans le cadre de l’Initiative Internationale pour les Récifs Coralliens (ICRI) à Monaco les 3 et 4 Décembre 2018


Les preuves qui s’accumulent depuis quelques années démontrent que les récifs coralliens sont les écosystèmes marins les plus sensibles aux changements climatiques et montrent déjà des signes importants de ces impacts par le phénomène connu sous le nom de blanchissement en masse qui affecte la plupart des récifs du monde. Le Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat (GIEC) a prévu, dans son dernier rapport publié en Octobre 2018 (Global warming at 1.5°C), un disparition quasi totale des coraux en 2100 pour une élévation de la température de +2°C.
Les récifs coralliens ne couvrent que 0,2% de la superficie des océans, mais abritent environ 30% des espèces marines connues à ce jour. Plus de 500 millions de personnes en dépendent directement à travers le monde, pour la pêche, le tourisme ou la protection des côtes contre l'érosion. Plusieurs menaces pèsent sur eux : des menaces locales (aménagements côtiers), pêche à l'explosif ou au cyanure, pollution, espèces invasives, mais surtout des menaces globales comme le réchauffement des eaux qui entraîne le blanchissement des coraux ou encore l'acidification des océans. Les formations coralliennes se composent d'une multitude d’unités appelées polypes, dont les sécrétions forment un squelette de calcaire qui grandit avec le temps. Ils vivent en symbiose avec des microalgues, appelées zooxanthelles, qui leur donnent à la fois l’essentiel de leur nourriture mais aussi leurs couleurs flamboyantes. Le blanchissement correspond à la perte de ces microalgues, le tissu corallien devient alors transparent et laisse ainsi voir le squelette blanc de la colonie.
Dans le but d'identifier, et surtout de classer les solutions à développer pour assurer une protection optimale des récifs, le Centre Scientifique de Monaco et le Think Tank Ocean Solutions Initiative dans le cadre de l'ICRI et avec le soutien financier de la Fondation Prince Albert II, de la Fondation Veolia, du Fonds français pour l'environnement mondial, de l'Association Monégasque sur l'Acidification des Océans, a convié à Monaco une dizaine d'experts parmi les meilleurs spécialistes au monde de la biologie de la conservation des récifs coralliens.
Le premier constat fait par les experts a été de confirmer l’urgence de la situation : les récifs sont en train de changer profondément : "Les récifs coralliens changent et ont déjà changé. Pour donner une image, c'est un peu comme si une forêt tropicale se transformait en garrigue méditerranéenne", explique le Pr Denis Allemand, Directeur Scientifique du Centre Scientifique de Monaco, co-organisateur de l’atelier et l’un des 14 experts de sept pays (Australie, Arabie Saoudite, États-Unis, France, Israël, Japon, Monaco) réunis dans ce groupe de travail. La fenêtre d’action est déjà étroite et se referme de plus en plus rapidement.
La seconde conclusion de l’atelier est que limiter le réchauffement climatique en mettant en œuvre l'Accord de Paris ne suffira pas à protéger les récifs coralliens : il faut également agir localement en développant des mécanismes de protection et d’adaptation des milieux et des espèces. Parmi ces solutions locales, certaines sont déjà employées, comme le développement des aires marines protégées, d’autres, qui ne font pas l'unanimité parmi les chercheurs, nécessitent des recherches et des tests supplémentaires comme la sélection, voire la manipulation génétique qui pourrait permettre de développer des souches de coraux - ou d’algues symbiotiques – résistants. "Des essais sont menés en laboratoire. Cela pourrait se révéler efficace à l'échelle d'une baie, mais certainement pas à l'échelle de la grande barrière de corail, dont la superficie est de près de 350 000 km" estime le chercheur Jean-Pierre Gattuso (CNRS, Sorbonne Université et IDDRI), également co-organisateur de l’atelier. Dans un autre registre, un test a été mené récemment pour faire ce que les scientifiques appellent de la "gestion des radiations solaires " et qui consiste à projeter des particules dans l'air pour augmenter la nébulosité et limiter la température. "Les Australiens sont aussi en train de développer un film protégeant les coraux du réchauffement, à l'instar des bâches blanches posées sur des glaciers en Autriche ", indique le Pr Allemand.
Le groupe d’experts va produire en début d’année 2019 des conclusions qui feront l’objet d’un article de haut niveau qui contribuera au sixième rapport d'évaluation du GIEC dont plusieurs experts présents font partie. Il constituera un élément important des négociations liées aux changements climatiques, menées dans le cadre des Nations Unies et contribuera à la stratégie de l’ICRI.

 

Liste des Experts :

  • Allemand, Denis (Principauté de Monaco)
  • Anthony, Ken (Australie)
  • Gattuso, Jean-Pierre (France)
  • Hilmi, Nathalie (Principauté de Monaco)
  • Hoegh-Guldberg, Ove (Australie)
  • Hughes, Terry (Australie)
  • Kayanne, Hajime (Japon)
  • Kleypas, Joanie (USA)
  • Magnan, Alexandre (France)
  • Mcleod, Elizabeth (USA)
  • Rinkevich, Buki (Israël)
  • Steneck, Bob (USA)
  • Voolstra, Chris (Arabie Saoudite)
  • Wachenfeld, David (Australie)
 

Pour plus d'informations, veuillez contacter : 

- Pr Denis Allemand
- Dr Jean-Pierre Gattuso
- Dr Nathalie Hilmi