Le potentiel des écosystèmes de carbone bleu pour combattre le changement climatique et fournir des co-bénéfices a été discuté dans le récent et influent rapport spécial du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat sur l'océan et la cryosphère dans un climat changeant. En termes de carbone bleu, le rapport s'est principalement concentré sur les zones humides côtières et n'a pas abordé les considérations socio-économiques de l'utilisation des systèmes océaniques naturels pour réduire les risques de perturbation du climat.
Dans cet article, le Dr Nathalie Hilmi et ses co-auteurs examinent les ressources de carbone bleu dans les écosystèmes côtiers, de haute mer et d'eaux profondes et soulignent les avantages de mesures telles que la restauration et la création ainsi que la conservation et la protection pour aider à libérer leur potentiel d'atténuation des risques liés au changement climatique. Ils mettent également en évidence les défis - tels que l'évaluation et la gouvernance - qui se posent à la mobilisation de leur rôle d'atténuation et discutons de la nécessité d'une action politique pour le développement du marché du capital naturel et d'une coordination mondiale. Les efforts visant à identifier et à résoudre ces défis pourraient à la fois maintenir et exploiter le potentiel de ces systèmes océaniques naturels pour stocker le carbone et aider à lutter contre le changement climatique. La conservation, la protection et la restauration des écosystèmes de carbone bleu devraient faire partie intégrante des plans d'atténuation et de conservation des stocks de carbone aux niveaux local, national et mondial.
Le rapport spécial sur l'océan et la cryosphère dans un climat en évolution fournit aux décideurs et aux parties prenantes une perspective holistique de l'état actuel de l'océan face au changement climatique. Il identifie les lacunes dans les connaissances et les incertitudes qui limitent la conception et la mise en œuvre des stratégies d'atténuation dans le cadre politique de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC). Il présente les mesures écologiques et économiques d'atténuation du changement climatique axées sur le carbone bleu et identifie deux approches de gestion. Il aborde brièvement les processus océaniques tels que les pompes biologiques et microbiennes qui transforment et transportent le carbone, et passe en revue les approches de la gestion des océans pour le climat. Il met en évidence le rejet de carbone par la perturbation des habitats végétalisés côtiers, la nécessité de protéger les habitats, et évoque le potentiel d'atténuation de la protection des habitats. Il traite également de la restauration, de la création et de l'optimisation de l'absorption et du stockage du carbone dans les écosystèmes côtiers et souligne la complexité de la définition de l'efficacité de ces mesures d'atténuation. Ce document élargit la discussion sur le rôle du carbone bleu dans les stratégies d'atténuation du changement climatique en se concentrant sur l'importance de conserver les voies marines existantes de fixation, de transport, d'enfouissement et de séquestration du carbone, et en soulignant les défis associés à la mesure, à l'évaluation, à la gestion et à la gouvernance du carbone dans les écosystèmes côtiers, de haute mer et d'eaux profondes.
Quelques messages clés de l’article :
... "les efforts de conservation ne peuvent être couronnés de succès que si les communautés locales font partie du processus décisionnel, où elles sont susceptibles de bénéficier directement d'un emploi significatif et d'un revenu régulier qui contribueraient à garantir l'appropriation de ces efforts.
...espèrent que la protection et la restauration des stocks de carbone marin et des processus de séquestration feront partie des discussions de la COP26 - Conférence des Nations unies sur le changement climatique, car cela contribuera également à résoudre la crise de la biodiversité marine et à réduire les risques d'impact sur les fonctions essentielles du système océanique...
...La période post-pandémique offre l'occasion de réorienter nos voies vers le développement économique en tenant compte du potentiel et de la valeur des services du système océanique, en commençant par des politiques intégrées liées à des stratégies de relance économique, sociale et environnementale. Des partenariats mondiaux menant à des actions immédiates sont nécessaires pour associer la protection sociale à l'action climatique et à la relance économique, afin de reconstruire et de transformer les économies d'un point de vue écologique"...
Publication en Biologie Marine - Economie environnementale
Figure 1. Exemples d'écosystèmes et de processus le long d'un gradient d'actions pouvant avoir des effets négatifs, neutres ou positifs sur le stockage du carbone. (A) Les engins de pêche démersale ont détruit de nombreux anciens récifs coralliens en eaux profondes au cours des 30 dernières années, et aucun n'a été restauré © JAGO-Team/IfM-GEOMAR). (B) Les populations de baleines ont été décimées par la chasse, les collisions avec les navires ou l'enchevêtrement dans les filets de pêche en plastique, ce qui réduit leur capacité à transférer le carbone de la surface de l'océan vers les profondeurs. (C) Les herbiers marins peuvent stocker de grandes quantités de carbone, mais ils sont en déclin dans le monde entier, ce qui nécessite une protection pour ceux qui restent © C. Vasapollo). (D) Les animaux pélagiques tels que les poissons mésopélagiques tirent le carbone des eaux peu profondes vers les grandes profondeurs, leurs populations doivent être maintenues pour protéger ce service écosystémique. Les aménagements côtiers ont fait disparaître la plupart des marais salants (E) et des forêts de mangroves (F) dans le monde, ce qui nécessite des efforts pour restaurer ou recréer ces importantes réserves naturelles de carbone.