Publication en Biologie Marine - Equipe d'Ecophysiologie

Les coraux noirs et leurs bactéries - La flexibilité est la clé du succès

Les coraux ne forment pas seulement les majestueux récifs coralliens peu profonds et très connus des régions tropicales. Dans les zones plus profondes des océans, appelées zones mésophotiques, d’autres espèces de coraux, avec un squelette flexible et ressemblant à des arbres, forment de grandes "forêts" qui abritent de nombreux autres animaux. Il était autrefois techniquement difficile d'explorer ces forêts profondes, mais grâce aux sous-marins et à la plongée en grande profondeur, nous pouvons maintenant les étudier.

Le corail noir Antipathella subpinnata est l'un des coraux formant les "forêts" de la zone mésophotique de la mer Méditerranée. Pour mieux comprendre la biologie de cette espèce, et des coraux noirs en général, les scientifiques du Centre Scientifique de Monaco et de l'université de Gênes ont uni leurs forces pour étudier la nutrition (Coppari et al 2020) et le rôle des organismes microbiens dans la santé de ce corail.

En examinant trois populations de corail noir au large de la côte ligurienne près de Savone, Bordighera et Portofino, les chercheurs ont constaté que A. subpinnata n'est pas systématiquement associé à une ou des bactéries particulières, comme c’est le cas pour les gorgones et le corail rouge qui vivent également en Méditerranée. Cette absence de "microbiome cœur" (communauté de microbes qui est systématiquement associée à une espèce) est tout à fait unique, car elle contraste fortement avec presque tous les autres coraux. Ainsi, le microbiote du corail noir est très différent d’un site à un autre (mais pas au sein d’un même site), vraisemblablement dû aux différentes conditions environnementales dans chaque site. Par exemple, des bactéries capables de dégrader les hydrocarbures étaient présentes en grand nombre sur les coraux noirs près de Savone, protégeant potentiellement ces coraux des effets néfastes de la pollution pétrolière en provenance du port voisin. Il se peut donc que le corail modifie activement son microbiote pour s'adapter à son environnement et à ses besoins. Mais indépendamment de cette "flexibilité microbienne", les fonctions importantes du microbiote ont été préservées. Les bactéries capables d'aider à la digestion des aliments, impliquées dans la protection contre les agents pathogènes ou bien encore impliquées dans le cycle des nutriments, comme l'azote et le soufre, étaient toujours présentes.

En conclusion, les résultats de l'étude suggèrent que A. subpinnata peut ajuster son microbiote pour s'acclimater/adapter aux conditions locales dominantes. Pour cela, le corail sélectionne les partenaires les plus bénéfiques compte tenu des circonstances, tout en conservant les principales fonctions du microbiote. Cette flexibilité peut à son tour expliquer en partie la large distribution de ce corail noir dans la zone mésophotique de la Méditerranée.

 

 


 

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